Adekar (Béjaïa) : Découverte d’une stèle gravée préhistorique

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DJAMEL ALILAT 03 MAI 2021 EL WATAN

C’est une bien étrange stèle qui a été découverte récemment à Adekar, dans la forêt de l’Akfadou, par Fikioui Hakim, un passionné d’histoire locale qui a déjà plusieurs découvertes à son actif.

A cet effet, nous nous sommes déplacés sur les lieux de la découverte en compagnie de Farid Kherbouche, directeur du Centre national des recherches anthropologiques et historiques (CNRPAH), afin de faire les premières observations sur place.

C’est un grand rocher plat presque entièrement enfoncé dans la terre tellement il est couvert de ronces et de buissons. Toute sa surface visible est couverte par une série d’étranges motifs géométriques concentriques, des pétroglyphes en spirales. Restée à l’abri des regards pendant des milliers d’années, la stèle est apparue au grand jour à la faveur d’un déboisement et d’un feu probablement opéré par des bergers ou des randonneurs.

Les motifs rupestres de la stèle se regroupent en quatre catégories : les spirales qui couvrent presque entièrement la surface visible et dont l’intérieur est marqué d’un point au centre, les motifs linéaires combinés, les méandres et un motif en forme de quadrillage.

Selon Farid Kherouche, cette découverte a déjà été signalée dans les années 1940 par un explorateur français, le Dr. Marchand, et figure dans le «Corpus des peintures et gravures rupestres de Grande Kabylie» de R. Poyto et J. C. Musso. Ces pétroglyphes sont bien préservées et ne présentent actuellement aucune altération.Advertisements

De tels motifs en spirale sont présents en grande quantités dans le Tassili, notamment dans la vallée de l’Oued Djerat, où ces gravures sont souvent représentées aux côtés de buffles antiques (bubale), ce qui les fait rattacher à la période stylistique dite «bubaline», groupe de gravures les plus anciennes connues au Sahara. On les trouve également aux îles Canaries, notamment sur l’île de Las Palmas, mais leur chronologie est postérieure à celles du Sahara. De tels vestiges existent en de nombreux autres endroits sur la planète comme l’Australie, l’Europe et l’Afrique du Sud où ils font encore partie intégrante des coutumes de certaines ethnies.

Cette découverte présente des similitudes avec ce qui est appelé ailleurs, «pierres à cupules» ou «pierres à écuelles». Une cupule est une forme pétroglyphe réalisée à la surface d’une roche ou d’un affleurement rocher. Il s’agit d’une dépression concave de forme circulaire ou ovale d’une profondeur de quelques millimètres. Certaines cupules sont entourées par des anneaux concentriques symétriques également tracés dans la pierre. Parfois plusieurs cupules sont reliées par une rigole. La signification de ces gravures reste aujourd’hui mystérieuse.

Les différentes explications proposées tentent de les relier, de manière subjective, à des activités ludiques, à la religion, à l’astronomie, au marquage d’un territoire ou encore aux rites funéraires. Afin de soustraire la pierre gravée aux regards des curieux qui pourraient éventuellement être tentés de la détruire, elle a été soigneusement recouverte de terre une fois les coordonnées GPS du site relevées.

Ces vestiges d’un art rupestre aujourd’hui éteint remonteraient à la préhistoire, vraisemblablement à la période néolithique, sans toutefois avancer avec certitude des datations absolues. Selon Farid Kherbouche, pour préciser la chronologie de ces gravures, il est nécessaire d’entreprendre des fouilles archéologiques dans cette zone pour pouvoir les rattacher à des occupations humaines pouvant être datées avec le mobilier archéologique que nous ne manquerons pas de découvrir dans les alentours.

Ailleurs, les spécialistes les rattachent au mésolithique (-9600 à -6000) lorsque les successeurs des hommes du Paléolithique s’adaptent au brusque réchauffement climatique.

Photo: La stèle est apparue à la faveur d’un déboisement / PHOTO : EL WATAN

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