Du cinéma plein l’écran de la petite salle polyvalente de la Maison de la Culture. C’est ainsi sans discontinuer au grand bonheur des cinéphiles de Béjaïa depuis maintenant près de deux mois.
Aux café littéraire et café-théâtre viennent alterner les café-ciné, ciné-club lycéens, ciné-club enfants et autres projections animées par l’association Project‘Heurts. Hakim Abdelfettah, le jeune responsable de l’activité cinéma est ravi pour ce qui se passe dans la petite salle feutrée. Il y a de quoi : les cycles ont lieu de manière régulière et quoique les 160 confortables fauteuils ne soient pas encore tous pris d’assaut, « un public commence à se former et à se fidéliser ». Au café-ciné, le programme est consacré au court métrage. En haut de l’affiche, « La fin des djinns » de Chérif Aggoune qui avait signé là, en 1990, la première réalisation courte en version amazighe. Sur fond de la guerre d’Algérie, c’est l’histoire d’un enfant dont l’imaginaire vogue sur un lit de superstitions. Suivront les projections de films produits par de jeunes réalisateurs, amateurs si l’on considère le fait qu’ils en soient à leurs premières œuvres. Mais n’ayant pas moins démérité par un talent naissant, si l’on en juge par les distinctions arrachées. Il s’agit de « Kif Kif » de Aksil Imoula qui avait été primé au festival du film amazigh d’Agadir au Maroc, (enlevant la mention spécial du jury), et au festival du film amazigh de Sétif de 2008 où il s’octroie le prix du meilleur scénario. Le scénario du court- métrage muet, tourné en noir et blanc, met à contre face les tribulations d’un jeune couple où chacun des deux conjoints décèle les duperies de l’autre.
Succèderont d’abord « Fateh » de Abdenour Ziani et « Aux limites du réel », cosigné par Lameri Aït Abbas et Mokhtar Dahmani. Un film d’atelier qui retrace les déboires d’un jeune intellectuel dans sa quête de se frayer une place socialement. La boucle du cycle court métrage est fermée par Houria de Mohamed Yargui. La maîtrise du scénario et de la direction des acteurs lui ont valu l’Ahaggar d’Or au festival international du film arabe 2007, le Taghit d’Or de la meilleure interprétation féminine et le prix spécial du jury au festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier en 2008. Houria incarne une femme « violée » par les écarts de la société. Notons que les débats, rehaussés par la présence des réalisateurs, ont beaucoup plus tourné autour de la problématique du cinéma en Algérie. Le public (en majorité des étudiants, quelques personnes âgées et trois ou quatre opérateurs économiques) a dressé un état des lieux qui frôle l’indigence. Que ce soit en matière de formation, d’infrastructure ou d’équipements. Le constat est étayé par le vieillissement de la filmothèque et de l’éclipse des nouvelles productions des géants de la cinématographie. Le tout aggravé par le peu de salles qui fonctionnent réellement dans le pays et qui ne dépasse pas la douzaine.
Par R. Oussada
El Watan 30 03 2009